Il est très apprécié des Suisses: le palmier chanvre du Tessin devient néanmoins officiellement invasif et indésirable. Si les palmiers de votre jardin peuvent être conservés, le Conseil fédéral a décidé ce printemps qu’à partir du 1er septembre 2024, il ne sera plus possible ni d’acheter ni de transporter ou partager à des proches ce palmier d’origine asiatique devenu au fil des décennies un symbole du Tessin. Au-delà de cet exemple, quelle est l’ampleur du problème des plantes invasives en Suisse?
La Suisse compte environ 4000 espèces végétales; 750 sont dites « néophytes », car elles ont été introduites après l’an 1500. Et 88 d’entre elles sont considérées comme « envahissantes », soit 2% du total.
Cela peut paraître peu. Mais les impacts, eux, sont énormes:
- Une perte de biodiversité, d’abord,
- Le rôle de la végétation s’en trouve aussi modifié: une forêt de palmiers protège moins bien contre les éboulements qu’une forêt de hêtres, car leurs racines restent en surface,
- Et puis, ces palmiers sont plus à risque d’incendie, car ils sont assez secs,
- Enfin, les plantes invasives peuvent coloniser les cultures et induire des pertes de rendement, ou impacter les infrastructures comme les barrages.
>> Voir: Considéré comme plante invasive, le palmier chanvre va être interdit de vente
Et ces impacts se traduisent en coûts : en Suisse, on parle de dizaines de millions de francs, chaque année. Au niveau mondial, si l’on inclut les espèces animales invasives, les impacts se montent à plus de 400 milliards de dollars par an, selon une étude publiée par l’IPBES à l’automne 2023.
Dès lors, le Conseil fédéral ne pouvait qu’agir. Dès ce 1er septembre 2024, suite à une modification ce printemps de l’Ordonnance fédérale sur la dissémination dans l’environnement des plantes invasives, 53 d’entre elles seront purement et simplement interdites à la vente et à la mise en place dans la nature. Comme le palmier du Tessin, mais aussi le mimosa. Ou encore le laurier-cerise, qu’on retrouve très souvent dans nos haies de jardin.
Pourtant, il ne faut pas se leurrer : éradiquer complètement les envahisseurs déjà installés est illusoire. Les scientifiques étudient donc d’autres solutions. Comme de relâcher des espèces ennemies de celles qui sont envahissantes: dans le cas du palmier chanvre, un papillon dont la chenille grignote le végétal. Problème: cet insecte s’attaque aussi à toutes les espèces de palmiers évaluées pour remplacer celle qui est invasive – une autre parade étudiée – et pas seulement l’envahisseur…
Couper les fleurs
Autre idée, toujours concernant le palmier chanvre: couper ses fleurs avant que celles-ci ne produisent de graines qui pourraient se répandre. Au Tessin, cette technique est déjà mise en pratique par les services publics, et les autorités l’encouragent auprès des particuliers. Mais c’est un travail digne d’Hercule! …. et à recommencer chaque année.
Avec sa décision drastiques de modifier son Ordonnance sur les espèces invasives, Berne veut donc limiter les dégâts où cela est encore possible. A Montreux par exemple: on sait que les palmiers y poussent bien, mais ils n’ont pas encore échappé à tout contrôle.
Quant à aux lauriers de nos jardins, faut-il les arracher? Pour l’instant, il n’y a pas d’obligation dans ce sens. Même s’il est recommandé de les remplacer par d’autres espèces. Et certains cantons, comme Vaud, offrent même des subventions pour cela.